Info Sud Ouest du 04 octobre 2012
Foie gras : la coopérative Sarlat-Périgord accusée de torture [ VIDEO ] En Dordogne, les activistes de Peta ont filmé l'intérieur d'un abattoir.
Ils dénoncent le gavage des oies. Polémique
Une oie qui
agonise, tremblotante, un
filet de sang qui perle du bec. D'autres littéralement
plombées par le poids des aliments dont elles sont gavées. Et pour commenter ces images, la voix de l'acteur
Roger Moore, qui dénonce ces
« tortures ». C'est une vidéo qui circule sur Internet, diffusée par les activistes de l'organisation
Peta. Elle accuse le magasin Fortnum & Mason de Piccadilly à Londres de se fournir dans cet abattoir qui ne respecterait pas les normes françaises. Il s'agit de la
coopérative Sarlat-Périgord, effectivement la seule à produire des oies en quantité, dans un département plutôt tourné vers le canard.
« Un montage, fait pour provoquer », soupire Xavier Gombert, le directeur de la coopérative. « Ils ont trafiqué la réalité. » Et d'inviter à venir sur place, pour constater. La vidéo a été tournée
à l'insu de la direction, en mai dernier. Selon le directeur, le montage met en scène un seul animal « blessé » dans une cage, parmi plusieurs centaines d'autres. Quant à l'oie qui agonise avant la guillotine, « elle a été oubliée » par l'un des employés, au moment d'étourdir les volatiles à l'électronarcose. « Une sur 600 bêtes traitées ce jour-là. Ils ne montrent que ça. » Fâcheuse coïncidence. Les coupes du film ne permettent pas d'enquêter plus avant. Mais
manipulation ou pas, le mal est fait.
Contre Fortnum & MasonLa Peta a utilisé ce film il y a quelques jours contre le prestigieux magasin anglais, qui travaille avec deux conserveries dont une approvisionnée par la coopérative périgourdine.
Fortnum & Mason a refusé d'identifier les abattoirs filmés et a expliqué que des visites sont régulièrement organisées pour s'assurer du respect des normes. Et le groupe s'est fendu d'un communiqué sur son site Internet, pour indiquer qu'il « ne permettra jamais [aux] oiseaux d'atteindre un stade où ils ne peuvent pas supporter leur
propre poids pour se déplacer librement ». Mais Peta indique qu'une autre marque de foie gras a été retirée des rayons quand l'infiltration a été découverte. Les vidéos ont déjà fait le tour de la Toile, mission accomplie.
Visionner la vidéo sur SudOuest
« Le souci, c'est qu'il y a des personnes
mal informées. Certaines pensent que le gavage dure des mois, alors que c'est 12 jours », explique Bernard Vernet, producteur à La Douze. Il montre à ses clients des oies qui gambadent après gavage, et dément (souvent) provoquer
« la cirrhose » chez ses oiseaux. « Ils ressortent en général rassurés et contents d'avoir appris quelque chose », dit-il. D'autres ressortent avec une vidéo, aussitôt diffusée
sur Internet.« C'est le revers de la médaille : une vidéo détournée », explique Guillaume Espinet, le président de l'association Foie gras du Périgord. Du coup, certains éleveurs n'accueillent plus de visiteurs, ou sous conditions draconiennes, et finissent par prêter le flanc aux critiques sur l'absence de transparence… Et le serpent de la rumeur mord la queue d'une profession de plus en plus forcée de se justifier.
« Ce n'est pas se justifier, mais informer », nuance Bernard Vernet. « Il y a plein de fausses croyances. Mais ça, c'est encore un épiphénomène qu'on met en avant. » Elles sont dopées par ce genre de vidéos. « On n'y peut rien : malheureusement, ces gens-là sont contre toutes les formes d'alimentation des animaux », explique Xavier Gombert. Guillaume Espinet parle aussi de « lobbies très puissants » qui font plus de mal à « l'image » de la profession, qu'à
l'économie locale. Les interdictions américaines ou ce genre de polémiques n'impactent pas un marché tourné vers d'autres pays. Pas encore.